Antonin Artaud, un homme torturé.

Publié le par Fabrice D

Antonin Artaud, un homme torturé.

Nul n’a jamais écrit ou peint, sculpté, modelé, construit, inventé, que pour sortir en fait de l’enfer.

Génie pour certains, fou pour d'autres, Artaud est poète, auteur et metteur en scène de théâtre, comédien, plasticien,

Antonin nait en 1896 à Marseille. Ses premiers troubles psychiques apparaissent dès l’âge de 4 ans. Il en souffrira toute sa vie.

Le poète entre en littérature en 1924 avec la publication de «  Correspondance avec Jacques Rivière ». Le directeur de la NRF a refusé de publier les poèmes d’Artaud (Ombilic des limbes et Pèse nerf), il s’ensuit un échange de lettres entre les deux hommes. (Artaud y mentionnera ses problèmes de santé).

Le poète participe  ensuite activement au mouvement surréaliste.

Puis, entre 1930 et 1936, Artaud s’essaie au théâtre et au cinéma où il jouera des petits rôles dans plus d’une vingtaine de films. Ses théories sur la mise en scène dans le théâtre de l’extrême influenceront plus tard le théâtre américain des années 1960. Il écrit aussi des pièces et des scénarios de films souvent très radicaux. (Il propose, par exemple, Dix-huit secondes, un scénario qui propose de dérouler sur l’écran les images qui défilent dans l’esprit d’un fou durant les dix-huit secondes précédant son suicide.).


En 1936, Artaud part au Mexique.  Là-bas, les rites des Tarahumaras dont celui du peyotl (cactus hallucinogène)  le marqueront toute sa vie.

Le Rite est que le nouveau soleil passe
par sept points avant d'éclater à l'orifice de la terre.

Et il y a six hommes,
un pour chaque soleil,
et un septième homme
qui est le soleil tout
CRU
habillé de noir et de chair rouge.

Or, ce septième homme
est un cheval
qui est le soleil
et non l'homme

Extrait de Tutuguri (Le rite du soleil noir)

Pour devenir un adulte, chaque  indien doit inventer son propre chant, sa propre langue son propre Tutuguri (étymologiquement la danse du hibou). Artaud est encore à la recherche  de son Tutuguri.

Son voyage en Irlande, l’année suivante, sera sa descente aux enfers. Il en est expulsé dans un état psychique déplorable (hallucination, paranoïa, il nie son identité, etc…). La toxicomanie (héroïne, cocaïne, laudanum) n’a pas arrangé l’homme. Il est hospitalisé en France dans des conditions exécrables. Puis ces dernières s’améliorent (grâce notamment à l’intervention de Robert Desnos). Il est donc, en 1943, interné à Rodez et suivi par le docteur Ferdière (l’un des pionniers de l’art thérapie).

Les critiques opposent souvent les textes fous de la fin de sa vie aux  textes fulgurants de ses débuts.

 

Dans les cahiers de Rodez, notre poète ne fait plus attention au style. Il écrit  de plein fouet comme il vit, sans rien rejeter. Sa poésie devient orale. Ces poèmes deviennent un fatras d’obscénités scatologiques, d’injures, de blasphèmes,….Une rage simple d’un petit enfant, par laquelle, il déchire le langage par le corps. Ce n’est plus des poèmes mais des cris. A travers les mots on entend son gémissement. Artaud passe même par la glossolalie. Avec des textes sans sens, des mantras magiques  il cherche à « tailler des brèches dans la pensée ». Certains le lisent comme un mystique. Il jetterait les mots et les silences pour essayer d’exploser la réalité du monde et entrevoir l’invisible. Il a l’œil au bout de la langue.

« Le monde est en train de foutre le camp dans le néant qui l’avalera comme le vieux utérus des mères, l’anus terro-fibreux des pères [..] »

Artaud meurt d’un cancer du rectum en 1948.

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